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Château Figeac : "notre mode de fonctionnement fondamental est l'amélioration et le renouvellement constants".

Suite à la promotion du Château Figeac de Saint-Emilion en Premier Grand Cru Classé A, notre correspondant à Bordeaux Colin Hay s'est entretenu avec Blandine de Brier Manoncourt et Frédéric Faye au sujet de l'appellation, de la classification et de la place de Figeac au sein de l'appellation. 

La promotion du Château Figeac en Premier Grand Cru Classé A, annoncée en septembre 2022, n'a surpris personne. Elle a été longue à venir et est amplement méritée, mais c'est dans la nature du classement de St-Emilion. Les propriétés qui sont élevées - surtout au rang de Premier Grand Cru Classé A (1GCCA) - sont promues un cycle complet de classement après que la plupart des commentateurs ont estimé qu'elles le méritaient, parce que la plupart des commentateurs fondent leurs évaluations sur la salle de dégustation, qui privilégie inévitablement les millésimes les plus récents.

Comme le souligne Blandine de Brier Manoncourt, secrétaire générale et copropriétaire du célèbre domaine bordelais, cette ascension est à la fois une reconnaissance du terroir très spécifique du château et "la récompense d'une vision et d'un travail de longue haleine". La promotion n'est pas, selon elle, "une simple récompense pour la qualité d'une poignée de millésimes récents", comme on le croit parfois. La performance d'une propriété est évaluée sur une période complète de 15 ans - et avec un décalage de trois millésimes - ce qui est logique pour que le classement fasse autorité.

Le reclassement s'est fait sur la base d'une dégustation des millésimes de 2005 à 2019, étayée par une multitude d'informations couvrant tous les aspects de l'activité du domaine, des méthodes de culture de la vigne aux données tarifaires et commerciales, en passant par les mesures environnementales et la recherche et le développement. Mais c'est l'effort et l'attente qui ont rendu la démarche encore plus gratifiante pour la famille et l'équipe de Figeac, explique M. de Brier Manoncourt.

"Nous avons patiemment attendu, en nous efforçant toujours d'améliorer ce que nous faisons, et nous sommes maintenant reconnus pour cette réussite collective", sourit-elle. "C'est fabuleux et réconfortant de recevoir tant de messages de bonne volonté, de félicitations et de soutien.

Bien qu'il s'agisse sans aucun doute d'un grand honneur - Figeac et Pavie sont maintenant les deux seuls châteaux dans la catégorie supérieure du classement - de Brier Manoncourt et le directeur général de Figeac, Frédéric Faye, prennent soin d'éviter la controverse sur le classement au cours des dernières années. Ainsi, trois des premiers grands crus classés A (Ausone et Cheval Blanc, suivis d'Angélus) se sont entièrement retirés du classement entre août 2021 et janvier 2022 en raison d'une divergence philosophique sur les critères du classement, sur fond de critiques selon lesquelles le classement "dérive vers le marketing".

Les retraits n'auraient guère pu être accueillis avec enthousiasme à Figeac, mais bien qu'il soit "regrettable" de ne pas être assis aux côtés de ces grands châteaux, "ce n'est pas vraiment notre préoccupation", insiste M. Faye. Il refuse également avec tact de spéculer sur la question de savoir si les trois châteaux se seraient retirés si Figeac avait été promu en 2012, la qualifiant de "question intéressante - bien que peut-être théorique" et déclare : "Nous respectons, comme nous l'avons toujours fait, les choix des autres et nous avons beaucoup de respect pour ces trois anciens 1GCCA. Ils ont fait leur choix, et ils ont leurs propres raisons - tout comme nous avons fait notre choix de soumettre un dossier pour la promotion au grade de 1GCCA. Nous sommes ravis du résultat, c'est aussi simple que cela".

Pour de nombreux observateurs, la question de la promotion de Figeac était devenue le test décisif de la crédibilité d'un système de classement compétitif pour St-Emilion qui n'a jamais été incontesté. Mais M. de Brier Manoncourt est convaincu que le classement de Saint-Émilion - et les classements compétitifs en général - ont "absolument" un avenir, qui doit être "nourri et soutenu".

"Il est de notre responsabilité collective de nous assurer qu'il fonctionne et qu'il est perçu comme tel", dit-elle en hochant la tête. "Nous considérons le classement comme une opportunité pour l'appellation, comme un stimulant pour les améliorations, disponible pour toutes les équipes et familles de St-Emilion, et pour les consommateurs qui recherchent des conseils.

"Il n'est jamais facile de mettre en place un système de classification compétitif, et une certaine controverse est inévitable. Mais nous sommes encouragés par le fait que la nouvelle classification a été bien accueillie. Cela devrait nous rendre tous optimistes quant à son avenir".

Lorsque je visite Figeac, il est clair que la propriété a été enthousiasmée et dynamisée par le reclassement, mais qu'elle n'a pas changé pour autant. Aussi agréable que cela puisse être, l'équipe se concentre inlassablement et très simplement sur les tâches quotidiennes qui consistent à essayer de faire en sorte que le meilleur millésime soit le prochain. En tant que tel, le classement n'est qu'un pas en avant, plutôt que l'objectif final du domaine, "une invitation à continuer à travailler comme nous l'avons toujours fait - avec calme, détermination et dynamisme", explique M. de Brier Manoncourt.

La vision à long terme reste "un engagement inébranlable à exprimer la qualité singulière de la palette de terroirs qui composent les vignobles de Figeac".

Nouvelle cave

Cet engagement vient de se concrétiser par la construction d'un nouveau chai de 15 millions de livres sterling, achevé en 2021, qui a donné à l'équipe plus d'espace, une technologie plus adaptée et de meilleurs outils à utiliser.

Les principaux facteurs qui ont motivé cet investissement massif sont "l'espace, la précision et l'excellence, afin d'exprimer avec pureté la complexité de notre terroir", explique M. de Brier Manoncourt.

"Le projet était basé sur le processus de vinification et la vision de ce dont nous avions besoin pour travailler encore mieux, au service du terroir de Château Figeac. Ensuite, il y a eu le design.

Les dix dernières années ont été marquées par d'énormes progrès en termes de précision dans les travaux viticoles du domaine, et l'équipe "voulait atteindre la même précision et la même excellence dans le processus de vinification que dans la viticulture", explique Faye. Les installations sont désormais trois fois plus grandes et "parfaitement équipées pour les besoins spécifiques de Figeac - précises et très pratiques".

La nouvelle cave se trouve au sommet de la colline du vignoble "comme un navire, à moitié visible et à moitié caché, vaste sous terre mais délibérément discret en surface", ajoute-t-il, afin de mieux s'intégrer dans son "paysage bien-aimé".

Conçu par l'architecte bordelais A3A, il a été envisagé avec sensibilité, sa surface de 5 000 m² comprenant deux niveaux souterrains, ce qui lui donne une allure de Tardis, massif à l'intérieur et pourtant parfaitement intégré aux bâtiments du château et au vignoble depuis l'extérieur. Il est tellement intemporel qu'on a l'impression qu'il a toujours été là, se fondant élégamment dans le paysage, mais la conception souterraine permet aussi de rendre les processus entièrement gravitaires et plus efficaces en termes de consommation d'énergie et de respect de l'environnement.

Le nouveau cuvier est autant une prouesse technique qu'un modèle architectural : huit cuves en chêne français certifié PEFC, disposées en cercle au cœur du cuvier, sont complétées par 40 cuves tronconiques en inox destinées aux vinifications parcellaires et intra-parcellaires. Elles permettent d'augmenter d'environ 40% le nombre de lots vinifiés séparément à partir desquels le grand vin est assemblé, permettant ainsi à l'équipe de travailler avec plus de précision pour exprimer la complexité du fabuleux terroir de Figeac.

"Ces 48 cuves, toutes fabriquées sur mesure, permettent d'obtenir une expression plus nuancée du terroir : la palette des saveurs devient de plus en plus pure et précise, et le vin gagne en complexité", explique Faye. "Par exemple, nous pouvons vinifier séparément chaque parcelle ou même intra-parcellaire, adapter nos choix à chaque cas précis. Résultat visible, pour l'assemblage, nous avons 40% de nuances en plus dans notre palette, et donc nos vins gagnent en complexité." Le domaine dispose également d'une vaste salle de dégustation bien éclairée, avec une vue imprenable sur la cave et les vignes, et de deux salons destinés à recevoir des invités au domaine.

Renouvellement continu

On pourrait penser que l'équipe s'accorderait une pause après cet investissement massif, mais il n'en est rien. Il y a "au moins 10 expériences à un moment donné de l'année", note M. de Brier Manoncourt, qui couvrent tous les domaines, de la chaîne d'approvisionnement à la santé du vignoble, de la vinification à la sélection des barriques et à l'impact environnemental, y compris une importante étude sur les émissions de carbone dans l'ensemble de la propriété.

"Notre mode de fonctionnement fondamental est l'amélioration et le renouvellement constants. Ainsi, Figeac a toujours de nouveaux projets, chacun visant à préserver ce qui fait la spécificité de nos vins tout en allant de l'avant", explique-t-elle. Par exemple, la replantation des vignobles est "un processus continu" pour maintenir la santé, la qualité et l'identité unique des vignes. Plus d'un tiers du vignoble a été replanté au cours de la dernière décennie, la replantation la plus récente s'appuyant sur une étude complète du sol, du climat et de la végétation au niveau des micro-parcelles, menée par une équipe de l'Université de Dijon en 2018. L'un des principaux projets à cette époque a été la mise en place d'une parcelle de sélection massive, appelée "La Collection".

"Cette véritable bibliothèque nous permet de replanter en utilisant le matériel génétique localisé et diversifié des trois cépages de notre vignoble", explique M. de Brier Manoncourt. "C'est particulièrement important dans le cadre de nos préparatifs en vue d'un changement de climat.

Méthodes de culture

Alors que le changement climatique est une question urgente, l'équipe du vignoble est devenue plus flexible dans ses méthodes de culture, ce qui lui a permis de relever les défis de 2022. Ce fut un millésime "climatiquement sans précédent", souligne Faye, en raison de la chaleur et de la sécheresse précoces et durables qui ont sévi dans tout le Bordelais. Pour relever les défis, les vignes et l'équipe ont dû s'adapter, en s'appuyant sur l'expérience acquise lors des derniers millésimes chauds, ainsi que sur son "approche agro-écologique systémique et profondément enracinée".

"Par exemple, afin de limiter l'évapotranspiration de la vigne et l'évaporation de l'eau du sol, nous avons utilisé différents outils et méthodes : couverture végétale entre les rangs, récolte à l'aube pour bénéficier des températures les plus fraîches, travail minimal du sol, pas d'effeuillage et limitation de l'étêtage", précise M. Faye.

Heureusement, Figeac dispose d'atouts naturels qui lui permettent de surmonter les conditions climatiques extrêmes, ajoute-t-il. "Les vignes sont profondément enracinées dans le sous-sol d'argile bleue, qui préserve l'humidité en profondeur. Des îlots de fraîcheur sont créés par les bois, les haies, les mares et les ruisseaux présents sur les 13 hectares du domaine non plantés en vignes", explique M. Faye.

Cela nous ramène à la raison profonde du succès du château : Le fameux terroir complexe de Figeac, une mosaïque de parcelles regroupées autour de trois affleurements de graviers de silex et de quartz de l'époque gunzienne sur un sous-sol d'argile bleue qui, associé à la diversité des micro-climats, constitue un terroir parfait pour le cabernet franc, le cabernet sauvignon et le merlot.

C'est cette qualité unique qui, avant tout, permet à de Brier Manoncourt d'affirmer que Figeac "continuera à dépasser les attentes et à assurer l'avenir du domaine pour les générations à venir". db

Propos recueillis par Colin Hay, édités par Arabella Mileham

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