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Sérendipité et rosé : l'histoire de Sainte Marguerite

Le hasard a peut-être amené les Fayard à se lancer dans la viticulture dans les années 1970, mais aujourd'hui, le domaine familial Château Sainte Marguerite est à l'avant-garde du boom du rosé de Provence, ce qui lui a valu d'être racheté par Pernod Ricard pour une somme importante. Quelle est la prochaine étape ? Richard Woodard le découvre.

Olivier Fayard

L'histoire du Château Sainte Marguerite, producteur de rosé de Provence, et de la famille Fayard, depuis ses origines il y a près de 50 ans jusqu'à la vente en 2022 d'une participation majoritaire au géant mondial des vins et spiritueux Pernod Ricard, est marquée par un heureux hasard.

En 1976, Jean-Pierre et Brigitte Fayard décident de s'installer dans le sud de la France avec leurs trois jeunes enfants. Ils vendent l'entreprise familiale de plasturgie et, un an plus tard, quittent Saint-Étienne pour s'installer dans une maison en Provence, près de la Méditerranée. La maison est accompagnée d'un petit vignoble. "À leur arrivée, le notaire leur a dit : "À propos, les vendanges commencent demain".

"Alors, raconte Olivier Fayard, fils aîné et aujourd'hui vigneron et directeur général de Sainte Marguerite, mon père s'est dit : "Peut-être que je peux être vigneron". La grand-mère d'Olivier n'en était pas si sûre et a dit à son fils : "Tu es un fou" : "Tu es un fou".

Son scepticisme était compréhensible. Certes, ce vignoble de trois hectares faisait partie des 23 (aujourd'hui 18) crus classés des Côtes-de-Provence depuis 1955, mais, dans les années 1970, cela ne comptait pas beaucoup.

"Le vignoble était complètement abandonné", explique Olivier. "Il faut comprendre qu'il y a 46 ans, personne ne pensait au rosé, ou alors seulement pendant deux mois, lorsqu'on partait en vacances dans le sud. Sinon, en France, quand on pensait au vin, on pensait au rouge ou au blanc".

Vignoble Sainte Marguerite

Jean-Pierre Fayard a ensuite travaillé dur, rénovant la maison, améliorant les vignobles et apprenant à faire du vin. "Il a imaginé que le rosé était vraiment un vin", dit Olivier. "Il a travaillé comme ça pendant une vingtaine d'années.

Au fur et à mesure que les enfants grandissent - Olivier, Lionel, Enzo et Sigolène, qui est née en Provence - le vin devient partie intégrante de leur vie. "Quand vous êtes enfants dans un domaine viticole, le week-end vous faites un vin, en vacances vous allez dans les vignes", se souvient Olivier. "Vous mettez la bouteille sur la machine à embouteiller, vous êtes là pour les vendanges. Vous vivez pour la cave, et ce n'est pas difficile d'aider vos parents, parce que c'est un jeu".

Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Aujourd'hui, Olivier est PDG et supervise la vinification avec Enzo, Sigolène s'occupe du bureau et Lionel a conçu les bouteilles et les étiquettes de Sainte Marguerite. "Ce n'est pas facile, car on ne s'arrête jamais", explique Olivier. "Un dîner de Noël, c'est une réunion spéciale pour décider des projets que nous avons pour l'année suivante.

L'arrivée d'une nouvelle génération a permis à Sainte Marguerite de se développer et de s'agrandir. Il y a 20 ans, le vignoble a été remanié par une sélection massale des meilleures vignes et des pratiques biologiques ont été introduites. Lorsque Olivier et ses frères et sœurs ont repris la gestion quotidienne de la cave il y a 15 ans, Sainte Marguerite comptait environ 25 hectares de vignes ; aujourd'hui, il y en a 200, répartis en 11 parcelles qui s'étendent sur 22 km entre le vignoble d'origine à La Londe-les-Maures et Pierrefeu-du-Var au nord-ouest.

Il y a cinq ans, l'assemblage du rosé phare Fantastique (qui tire son nom de la Symphonie Fantastique de Berlioz) a été modifié et comprend désormais 80 % de grenache et 20 % de rolle (vermentino), qui confèrent respectivement à ce vin ultra-pâle des arômes distinctifs de pêche et de poire. Il existe également un Fantastique rouge (60-70 % de syrah, plus du grenache) et un Fantastique blanc fermenté en barrique (100 % de rolle). Un rosé à prix réduit, Symphonie, complète la gamme.

Vignoble Sainte Marguerite

Après avoir fait d'un vignoble abandonné l'un des principaux acteurs de la success story du rosé de Provence, pourquoi vendre maintenant ? L'attrait financier est évident, tant en ce qui concerne la transaction elle-même - Pernod a acheté les actions de Jean-Pierre et Brigitte Fayard, laissant les enfants avec une participation minoritaire - que l'accès aux coffres profonds d'une entreprise multinationale. Mais les Fayard avaient rejeté plusieurs autres offres avant que Pernod ne se présente.

"Ce n'est pas difficile d'entrer chez Pernod Ricard, car c'est l'histoire d'une rencontre, d'un rendez-vous", dit Olivier. Un ami lui propose de déjeuner avec Alexandre Ricard, PDG de Pernod, "parce que vous avez le même caractère, le même âge, la même philosophie, la même motivation, la même origine" (Fayard vient d'avoir 50 ans, Ricard en a 51). Fayard n'a pas vraiment sauté sur l'occasion - il l'a oubliée et un mois s'est écoulé - mais les deux hommes ont fini par se rencontrer et la discussion a commencé.

"C'est très simple", explique Olivier. "Je sais comment faire un bon vin et Pernod Ricard peut m'aider à me développer plus rapidement, parce qu'il a l'argent nécessaire pour acheter un nouvel établissement et qu'il s'agit du deuxième groupe de spiritueux au monde. Je pense que c'est un bon vendeur pour moi.

"Mais c'est aussi un sentiment entre Alexandre et moi - deux familles du sud avec le même caractère, la même motivation, le même objectif.

Sous l'égide de Pernod, Sainte Marguerite est déjà entrée sur le marché américain et il est prévu d'augmenter la production à 2 millions de bouteilles par an (contre 1,2 à 1,3 million de bouteilles actuellement). Avec la montée en flèche du prix des terres en Provence, due au boom du rosé, un partenaire fortuné devient rapidement une nécessité.

Barriques Ste Marguerite

Sainte Marguerite se transforme également en négociant, en concluant un partenariat avec un propriétaire terrien voisin pour l'approvisionnement en raisins de Symphonie. Une démarche similaire, il y a une vingtaine d'années, a été abandonnée pour des raisons de qualité, mais Olivier insiste sur le fait que des leçons ont été tirées de cette expérience.

Le vignoble, explique-t-il, sera planté avec la sélection massale de Sainte Marguerite. "Au moment des vendanges, je vendange avec ma machine, mon équipe", ajoute-t-il. "Je presse les raisins. La fermentation se fait chez moi. Je contrôle au maximum la qualité du raisin, et donc la qualité du vin. Je paie plus cher [pour le raisin], mais je paie plus cher si c'est bio, mes plants, et nous avons un échange avec mon équipe."

Il ne fait aucun doute que d'autres changements suivront sous l'égide de Pernod, notamment une nouvelle expansion internationale et de nouveaux vins, même si Olivier estime qu'il est "trop tôt" pour en parler pour l'instant. Le nouveau propriétaire produira-t-il plus (ou moins) de vins rouges et blancs de Sainte Marguerite ?

La vente à Pernod - qui fait écho aux récentes acquisitions de Minuty, d'Esclans et de Galoupet par Moët Hennessy - est en tout cas un énorme vote de confiance dans un style de vin qui, il y a une génération, n'était qu'un pis-aller dans les cercles de grands vins. "Nous avons deux endroits très dynamiques en France aujourd'hui", déclare Olivier Fayard, non sans une certaine fierté et satisfaction. "Il s'agit de la Champagne et des Côtes-de-Provence.

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